Une forme de système
Le nazisme est sorti d’un courant de pensée profond et
relativement homogène. Aucun penseur allemand n’aurait été fier d’un disciple
comme Hitler, cependant les thèmes du nazisme lui auraient été familiers. Ce
qui peut expliquer que tant de monde ait pu s’y retrouver, ou même penser
l’influencer (Heidegger et Carl Schmidt ?).
La pensée allemande a été une réaction à la brutale
transformation de la société amenée par la Révolution industrielle. De ce fait,
elle s’est bâtie contre les causes de cette transformation : les Lumières
et le progrès. Elle a trouvé le salut dans une forme de fondamentalisme. Une vision
fantasmée de son passé, mélange d’influences multiples dont certaines remontent
à très loin. L’Allemand appartiendrait à une race élue et persécutée qui doit
régénérer le monde. Sa langue, d’ailleurs, est celle des origines (une idée que
l’on retrouve chez Heidegger).
D’une certaine façon, une sorte de régression se serait jouée
au moment de la transition entre Kant et Hegel. Hegel rejette la raison de Kant
et en revient à la métaphysique (il suffit de suivre son cœur pour faire le
bien). Quant à Nietzche, il est tellement provoquant qu'il est aisé de se méprendre sur ses propos.
Lorenz et les thèmes
du nazisme
À l’individu, universel, et à la raison des Lumières, la
pensée allemande oppose donc l’espèce et une forme de mission divine, et la
croyance que « la force seule crée
le droit ». à noter que
qui dit race, dit amélioration de la race (au sens troupeau du terme), i.e.
biologie et eugénisme.
Curieusement, comme dans la théorie de l’agressivité de
Lorenz, cette société est « anti », français, révolutionnaire,
libéral, sémite…
Que Konrad Lorenz semble aussi marqué par un courant de
pensée qui a mené au cataclysme, signifie-t-il que l’on doive condamner ses
travaux ? Jacques Taminiaux parlant d’Heidegger : « tous les grands noms de la pensée européenne
se sont confrontés à Heidegger. Leur œuvre est née dans cette confrontation. »
Une idée à reprendre concernant la pensée de Konrad Lorenz : utile comme stimulant,
mais non comme fin ?
Compléments :
- Billet inspiré notamment par : Une histoire allemande de Georges Bensoussan (fondements de la pensée allemande d’avant guerre) ; Nietzsche le dynamiteur de Yannis Constantides ; Pensée juive et pensée allemande de Luc Ferry (Hegel) ; Jacques Terminiaux : La philosophe est-elle soluble dans le nazisme ?
- Tout ceci est assez cohérent avec les conclusions que j’avais atteintes jusqu’ici. Sur ce blog, revues de livres : Heidegger pour les nuls, Kant pour les nuls, Kant et les lumières, Nietzsche, Troisième Reich (George Mosse et le mouvement völkisch), Le savant et le politique (Max Weber).
2 commentaires:
Je pense que LORENZ considère que l'agressivité est intrinsèque aux espèces et qu'elle ne doit pas être niée mais canalisée par le rite dans les espèces, dans les communautés pour la positiver.
Un peu comme la théorie des énergies asiatiques qui circulent dans les corps par le méridiens une bonne circulation fait un être épanoui et en bonne santé une circulation bloquer déclenche la maladie.
Les règles de la société sont là pour utiliser positivement cette agressivité reconnue biologiquement par d'autres que LORENZ .
Le rite n'est-il là que pour "canaliser"? Le rite, c'est à dire le comportement collectif, est le fondement de la société, et le matériau de base de la conduite du changement. (Par exemple, la façon de se vêtir des membres d'une entreprise est un rite, aussi bien que leur façon de prendre des décisions, de "planifier à moyen terme", etc.
Par conséquent, il est aussi possible de dire que "l'agressivité", qui est peut-être simplement l'énergie d'avancer, la motivation de l'individu, permet à la société d'être ce qu'elle est.
Par ailleurs, je complète ce billet en disant que ce n'est pas parce que Lorenz, comme Heidegger, a partagé les idées de son milieu (qui ne le fait pas?), que ses travaux ne sont pas scientifiques, et intéressants. Il faut juste ne pas en tirer de conclusions trop hâtives.
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