lundi 9 août 2010

Dislocation de l’État

Paul Krugman donne une image inquiétante de l’Amérique : on y démolit les routes, on rogne sur l’éclairage de celles qui restent, on réduit l’année scolaire et on licencie les enseignants… pour ne pas avoir à augmenter les impôts (principalement des plus riches). Quel peut-être l’avenir d’un pays sans infrastructure et dont les ressortissants sont incultes ? Est-ce cela le triomphe du capitalisme ?

L’Amérique s’est convaincue que l’État n’était qu’incompétence, qu’il fallait le démonter. Plus possible maintenant de revenir en arrière.

Curieux comme notre pensée a pu évoluer en quelques décennies. Jadis, l’État c’était le bien et l’efficacité. C’était la lumière qui éclairait la nation. Au moins en France, les fonctionnaires étaient issus de l’élite intellectuelle (cf. les instituteurs et les polytechniciens). Ils avaient choisi de « servir le pays » en renonçant aux bénéfices financiers qu’auraient pu leur apporter leurs talents employés ailleurs.

Comment expliquer ce changement ? Mon hypothèse du moment est qu’il n’y a pas eu manipulation. Les idées qui dominent actuellement le monde sont extrêmement anciennes, Galbraith les trouvait dépassées dans les années 50. Ce qui a changé est peut-être les forces qui s’y opposaient : les contraintes de la société nous sont devenues insupportables. Victoire de l'individualisme. Dans ce nouvel environnement a triomphé ceux qui étaient le plus déterminés et les mieux préparés.

Compléments :

2 commentaires:

Julien a dit…

J'imagine que vous appliquez votre réflexion à la France, ce qui, il me semble, n'apparaît pas dans votre billet.. Car l'Amérique s'est _construite_ sur la défiance envers l'État.

C'est la nature même de son contrat social, qui s'inspire de Locke : l'État est là pour protéger les droits naturels que sont 1/ la liberté et 2/ la propriété privée.

Le contrat social français est beaucoup plus Rousseauiste, basé sur la recherche d'un "intérêt général".

Là où je vous rejoins, c'est la tendance des dernières décennies du modèle américain à s'étendre au reste du monde...

Christophe Faurie a dit…

C'est certain que l'Amérique et nous n'avons pas les mêmes traditions.
Mais l'Amérique a été pendant des années extrêmement planificatrice (cf. ma référence à Galbraith). Peut-être était-ce le résultat du succès de 40, qui avait montré l'État à son meilleur? Puis de la guerre froide ?
Par ailleurs les réductions de coût actuelles semblent attaquer le "muscle", ce qui permet de nourrir l'économie : les infrastructures et l'éducation. Cela ne semble pas dans la tradition américaine, d'un grand pays optimiste, entreprenant, riche et généreux.