À la réflexion, je pense que j’ai été injuste avec mon instituteur de CM2. L’Éducation nationale d’avant 68 ne faisait, effectivement, pas appel à l’intelligence. Elle était coupable de ce qui fait échouer le changement : elle nous disait comment et pas pourquoi. C’est la logique de l’ordre.
Au fond, un enseignement qui ne s’adresse pas à l’intelligence est totalitaire. Il forme, par l’échec répété, des « collaborateurs », qui obéissent sans comprendre. Il me semble aussi créer des hypocrites, qui disent adhérer à des valeurs auxquelles ils ne croient pas : je constate régulièrement que le premier talent du bon élève est de plaire à l’enseignant ; quant à ce que dit son cours, ils n’en a pas la moindre idée – quelle importance ?
Les « gauchistes » réformateurs de l’Éducation nationale ont dû essayer de dire « pourquoi ». Ils étaient plein de bonne volonté. Malheureusement, ils ont échoué. Ils ont rendu l’enseignement encore plus incompréhensible qu’avant, et ont donné un avantage décisif à l’enfant qui pouvait être aidé.
D’où vient leur échec ? Certaines choses doivent être apprises d’abord et comprises ensuite ? Pour les autres, ils ont été incapables d’arriver au pourquoi ? Ils ont continué à faire du « comment », en apparemment plus facile, en fait en beaucoup plus délayé, et beaucoup moins compréhensible ?
Compléments :
- Ce type d’enseignement explique aussi peut-être que nous ayons nous aussi tendance à donner des ordres, à nos enfants ou à nos entreprises : « apprend l’anglais, mettez en place ce logiciel ». D’où la résistance que rencontrent nos changements : ils sont vus comme dictatoriaux et arbitraires. (Délinquance juvénile, Réforme des hôpitaux et malédiction du moyen.)
- Une organisation qui impose à ses membres des règles fortes et incompréhensibles peut être une explication du taux de suicides élevé de pays apparemment fort civilisés comme le Japon : une formation par l’échec est destructrice.
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