mercredi 3 septembre 2008

Dangereux enseignement

Suite de mes réflexions de rentrée. Ce qui me frappe est que notre système scolaire est en extrême décalage avec les besoins du marché de l’emploi. Plus en termes d’état d’esprit, d’ailleurs, que de connaissances enseignées. Que faut-il aujourd’hui pour trouver un emploi ?
  1. Il faut être un entrepreneur. Et ce même si l’on ne veut pas diriger une entreprise. Il faut avoir développé un talent, quasi unique. Mais il faut savoir, sans arrêt, l’adapter au besoin de la société, aux règles du jeu ambiantes. La capacité au changement est devenue capitale.
  2. Dans notre monde on n’obtient rien sans les autres, le réseau social est essentiel. Il faut donc savoir se faire des amis.
  3. Il faut être ouvert sur l’étranger, ne serait-ce que pour y voir apparaître des tendances qui peuvent bouleverser notre vie.
Or, de quoi rêvent le parent pour ses enfants ? D’un diplôme, qui leur permettra de trouver une situation où ils seront protégés. D’une situation « noble », intellectuelle. Grande école d’ingénieur, de commerce, médecine, droit. Sinon une formation qui mène à bac + 5. Résultat : nous formons des intermittents du spectacle. Il y a trop de Bac + 5, des intellectuels gorgés d’un savoir théorique non assimilé, qui ne trouvent aucune tâche digne d’eux. Je m’interroge sur l’explosion du nombre des écoles de commerce. Les études de médecine sont devenues un coupe gorge, beaucoup de juristes, et surtout de journalistes, ont du mal à joindre les deux bouts… à côté de cela beaucoup d’emplois ne trouvent pas preneur. Et le pire est peut-être à venir. En fait, je crois qu'il y a lien direct entre notre volonté d’être protégé et les hantises de nos gouvernants :
  • L’exemple de la Poste. J’entends ce matin à la radio que l’on parle de sa privatisation. Une grève se prépare. Au fond, pourquoi privatiser la Poste ? Je ne suis pas convaincu par l’argument économique. Je n’en ai jamais vu de preuve évidente. Une poste qui se sait entreprise privée, et non service public, va se comporter en monopole de livre d’économie. Elle va maximiser ses bénéfices, chercher le gain à court terme. Attention à la qualité du service. Il va falloir la contrôler. Difficile (impossible ?) et cher. Et il n’est pas dit que sa masse salariale régresse : la sécurité de l’emploi produit des employés, et surtout des dirigeants, dévoués et peu gourmands…
  • Et si la principale raison de la réforme était la protection que la Poste offre à ses employés ? Cette protection n'est-elle pas une preuve indirecte d’inefficacité ? Leur attitude revendicatrice ne renforce-t-elle pas cette idée ? Abattre cette résistance ne rendra-t-elle pas l’entreprise fatalement meilleure ?
Je crois que ce que nos gouvernants veulent éliminer c’est notre exigence de protection. C’est notre repli sur soi.

Références :
  • Sur la transformation du système éducatif français en une formation intellectuelle et coupée de la réalité : PROST, Antoine, Éducation, société et politiques: Une histoire de l'enseignement de 1945 à nos jours, Seuil, 1997.

2 commentaires:

Herve a dit…

La fin du modele social français, en somme? C'est un peu triste.

Christophe Faurie a dit…

A mon avis, c'est une évolution plutôt qu'une destruction. Et c'est à nous de faire qu'elle ne soit pas triste !